15. Les pieds de nos parents étaient noirs

jalons et portraits 15

 

 

 

LES PIEDS DE NOS PARENTS

ÉTAIENT NOIRS

 

 

Après les bonjours, les bises, sororale et belle-sororale, les assieds-toi donc et les comment ça va depuis qu’on s’est vu, il y eut un silence absolu, comme si ni Pierre Clodard, ni sa sœur Jeannine, ni sa femme Rosalie n’avaient plus rien à se dire.

La maison, située dans un quartier recherché de Paris, à proximité du Bois de Boulogne, était celle qu’Etienne Clodard père avait achetée après son départ forcé de l’Algérie devenue indépendante. On y respirait partout, mais surtout dans ce salon, le parfum d’un autre continent et d’un autre siècle. L’influence nord-africaine se lisait dans l’ameublement : les longs divans bas contre les murs, les tapis, non pas posés sur le sol, mais accrochés aux murs, les petites tables sur l’une desquelles était posé un de ces minuscules services à café algériens en cuivre, chaque tasse reposant sur une soucoupe de cuivre martelé et ornée en son bord d’une ciselure d’écriture arabe stylisée. En contraste absolu, la pièce portait aussi la marque de ce qu’Etienne Clodard, administrateur ex-colonial, pensait, du fond des chaleurs barbares de l’Afrique, être le summum de l’élégance parisienne, du papier peint fleuri, l’éclat pesant des rideaux de chintz, et deux fauteuils, ventrus à l’excès, importuns.

Pierre avait des amis qui disaient qu’il était impossible de dire si le décor de la maison était le reflet de son esprit, ou si, au contraire, celui-ci avait été conditionné par la maison.

C’était un homme d’une élégance et d’un charme certains, mince et nerveux, et dont le talent de pianiste aurait pu être deviné même en l’absence du bel instrument qui occupait le coin le mieux éclairé de la pièce. De plus, même sans avoir examiné la sonothèque qui flanquait le mince écran de son holographe d’un modèle ancien, on aurait pu prédire sa préférence pour Debussy et Satie. Des pointes de calvitie commençaient à pénétrer sa chevelure noire. Lorsqu’il était plus jeune, il avait un moment cédé à la mode de la barbe, mais, depuis quelques années, il rasait son menton et ses joues et ne laissait qu’une moustache soignée souligner le contour sensible de sa bouche.

La beauté d’une nature raffinée, plutôt intellectuelle, et peut-être faible, qui émanait de lui était reconnaissable chez sa sœur Jeannine mais sous une forme qui était imperceptiblement moins que de la beauté. Comme lui, et comme leurs parents, elle était mince et brune mais son teint était plus pâle, son ossature plus frêle et ses yeux plus grands. À quarante et un ans, elle ne portait son âge que dans les rides du pourtour de ses yeux et de la base de son cou. Pour le reste, elle paraissait trente ans.

Rosalie lui était un saisissant contraire : potelée, les joues pleines, les yeux d’un bleu turquoise brillant, le cheveu châtain. Elle était d’un naturel enjoué, mais, pour quelque raison qu’elle aurait souhaité découvrir, parce qu’elle le ressentait comme un terrible défaut, la présence simultanée, dans la même pièce, de son mari et de sa belle-sœur la faisait se sentir vide et cafardeuse.

Dans un effort désespéré pour introduire un peu de bonne humeur, elle dit : « Jeannine, tu veux que je te fasse du café, ou bien tu préfères un alcool ? »

« Un café, ce sera parfait », dit Jeannine.

« Et du kif ? » suggéra Pierre. Il prit une boîte en argent repoussé sur la plus proche des nombreuses tables basses, et il s’en échappa, lorsqu’il souleva le couvercle, le parfum spécial du meilleur haschisch marocain.

Incapable de dissimuler sa hâte, Rosalie quitta précipitamment la pièce. Jeannine regarda les moulures désuètes de la porte qui venait de se refermer, s’inclinant à peine vers la flamme que Pierre lui tendait.

« J’espère pour toi que tu ne trouves pas la vie aussi compliquée que moi », dit-elle.

Pierre haussa les épaules. « Rosalie et moi, on s’en tire. »

« On devrait faire mieux que s’en tirer », dit Jeannine avec une sorte d’entêtement.

« Tu t’es disputée avec Raoul », dit Pierre, évoquant le dernier des nombreux amants de sa sœur.

« Se disputer ? Oh, non. On ne se dispute plus. On n’en a plus la force. Mais, tu sais, Pierre, il n’y en a plus pour longtemps. Les illusions commencent à me manquer. »

Pierre se renversa en arrière sur le divan. Il préférait les divans aux fauteuils, bien que ceux-ci fussent mieux proportionnés à la longueur de ses jambes. Il dit : « Rien qu’à la fréquence de tes visites, je peux suivre le déroulement de tes affaires de cœur. »

« Tu as l’impression que je te prends pour le mur des lamentations ? » Jeannine eut un petit rire amer. « C’est peut-être vrai, mais qu’y puis-je si tu es la seule personne à qui je puisse parler ouvertement ? Il y a quelque chose entre nous que jamais les étrangers ne pourront comprendre. C’est précieux, et je ne le gaspille pas. »

Elle hésita. « Rosalie le sent bien », ajouta-t-elle finalement. « Tu peux voir la tête qu’elle fait quand j’arrive. Et c’est aussi pour ça que je ne viens que quand j’en ai vraiment besoin. »

« Tu as l’impression qu’elle te fait sentir que tu es de trop ? »

« Non, pas ça ! Elle est la politesse même. Elle est seulement comme tout le monde, et elle ne peut pas comprendre ce qu’elle n’a pas vécu. » Jeannine se redressa et leva sa cigarette de kif comme la règle d’un instituteur montrant un mot au tableau noir. « Rends-toi bien compte, chéri, nous ne sommes pas les seuls, à être déracinés. Depuis qu’ils ont abattu les barrières douanières entre les pays de ce vieux continent fatigué, rien qu’à Paris, il doit y avoir cinquante nationalités différentes, et bon nombre, comme les Grecs, s’y sentent mieux que chez eux. Et comme nous, aussi. »

« Mieux que chez nous ? » releva Pierre. « Mais nous n’avons pas de chez nous, ça n’a jamais existé que dans l’esprit de nos parents. »

Jeannine secoua la tête. « Je crois qu’ils n’auraient pas pu être déçus par une ville aussi belle que Paris s’ils n’avaient pas été réellement heureux dans un vrai pays. »

« Oui, mais de plus en plus, ils ne parlaient plus que des bonnes choses. Ils en oubliaient les mauvaises. L’Algérie qu’ils imaginaient a disparu pour toujours sous la vague de désordre, d’assassinats et de guerre civile. »

« Et pourtant, c’est ça qui les rendait heureux, on ne peut pas dire le contraire. »

Pierre soupira et haussa les épaules.

« Cela veut donc dire que toi et moi, nous ne sommes pas des expatriés, nous sommes des extemporés. Nous venons d’un pays qui a disparu avant notre naissance, et dont nos parents, sans le vouloir, nous ont donné la nationalité. » Elle s’arrêta, fouillant de son regard noir et perçant le visage de son frère. « Je vois que tu comprends, je n’ai jamais cru que tu ne comprendrais pas. »

Brièvement, elle posa sa main sur celle de son frère.

« Vous n’êtes pas encore en train de discuter de l’Algérie ? » dit Rosalie en entrant, portant la cafetière assortie aux tasses. Elle sembla avoir voulu tourner le sujet en plaisanterie. « Tu sais, Jeannine, c’est toujours ce que je dis à Pierre, autant cela devait être bon d’y vivre autrefois, autant maintenant, cela ne me dirait rien. »

« Évidemment », dit Jeannine avec un sourire forcé. « La vie à Paris est déjà suffisamment triste – je ne vois pas qui se soucierait d’aller supporter les avanies d’un gouvernement indigène. »

« Qu’est-ce qu’il y a donc de si triste à Paris, en ce moment ? »

« Tu as peut-être la chance de ne pas le remarquer comme moi. Tu as ton chez toi bien tranquille et rien d’autre à faire que t’en occuper pendant que Pierre va gagner le fric du ménage à sa banque. Mais moi, je travaille, et je peux te dire que dans la publicité de mode, il faut s’accrocher un peu plus qu’à la banque. Il y a plus de salauds au mètre carré, et ils ont le bras autrement plus long qu’à la banque ! »

Pierre alerta sa sœur du regard. Lorsqu’elle était de cette humeur, le kif lui déliait la langue plus que ne le permettait la politesse, et, plus d’une fois – pas avec Rosalie, mais avec sa première femme – il avait été obligé d’aplanir de sérieux différends dus aux écarts de langage que commettait Jeannine lorsqu’elle planait.

« Mais même les salauds ont leur utilité », poursuivit-elle. « C’est ce que j’étais venu te dire, Pierre. Tu sais que Raoul travaille au service de prospective de la Communauté européenne ? »

Pierre acquiesça. Le service de prospective occupait à Fontainebleau un bâtiment qui avait hébergé une délégation de l’OTAN. Maintenant, il était rempli d’ordinateurs où l’on enfournait chaque jour les rapports des services de renseignements, commerciaux et militaires, pour en extraire des analyses de tendance.

« C’est quelque chose d’intéressant… » reprit Jeannine. « Tu sais aussi que le service de prospective ne traite pas seulement les données européennes, mais aussi tout ce qu’envoient nos anciennes colonies, moyennant un tarif de faveur, en souvenir du bon vieux temps ? Et tu as entendu parler du projet minier sous-marin lancé par la compagnie américaine General Technics ? »

« Évidemment. »

« Les Américains ont envoyé des gens pour évaluer le coût du transport des matières premières depuis Port-Mey, au Béninia. Et la même compagnie est en train de faire des démarches auprès des anciens administrateurs coloniaux à Londres. Raoul me dit que les ordinateurs prévoient le débarquement d’une nouvelle compagnie à Port Mey pour traiter tous ces minerais. »

Il y eut un silence. En tendant son café à Jeannine, elle la regarda avec effarement, puis regarda son mari, puis de nouveau Jeannine, se demandant ce que pouvait signifier cet air de méditation tendue qui était apparu sur leurs deux visages.

« Tu as vu Hélène, celle qui travaillait au Mali ? » dit Pierre, finalement, ignorant sa femme.

« Oui. Et tu as rencontré Henri, qui vient de Haute-Volta ? »

« Oui. »

« Alors, tu es aussi intelligent qu’un ordinateur. »

« Non, mais c’est logique. »

« Je ne comprends pas », dit Rosalie.

Pierre la regarda longuement avec une sorte de pitié. « Pourquoi une grande compagnie américaine irait-elle chercher d’anciens fonctionnaires coloniaux à Londres, si ce n’est précisément parce qu’elle sait que les Américains ignorent tout de la mentalité africaine ? »

Avant que Rosalie eût pu admettre que la question ne l’avait guère éclairée, Jeannine dit : « Ce serait extraordinaire, non ? On doit reconnaître que les Américains ne sont plus tout à fait des barbares. »

« Mais un pays qui n’a pas bénéficié de la culture française, dans la Baie du Bénin… »

« Une partie du pays a été occupée par les Berbères, qui, en tout état de cause, sont les cousins des peuples d’Algérie et du Maroc. »

Soudain, Rosalie dit, avec une audace aussi soudaine qu’inhabituelle, sur le ton du « après-tout-je-suis-chez-moi » : « Vous allez me dire ce que vous mijotez ? »

Le frère et la sœur se regardèrent. Un des sourcils de Jeannine se leva, comme pour dire : « Avec une femme comme elle, que peux-tu espérer faire ? » Rosalie le devina et rougit, espérant que Pierre, par loyauté envers elle, ferait celui qui n’avait rien vu.

Au lieu de cela, il copia l’expression de sa sœur.

« Je lui parle d’un éventuel retour en Afrique », dit Jeannine. « Pourquoi pas ? J’en ai marre de la France et de ses Français qui ont cessé d’être français pour devenir des bâtards moulés sur le type moyen de la Communauté européenne. »

« Qu’est-ce qui te fait croire que tu pourras y aller ? » répliqua Pierre.

« Raoul dit qu’ils ont l’intention de recruter des conseillers ayant déjà exercé en Afrique. Ça ne doit pas faire des foules de gens. Et après tout, chéri, ni toi ni moi ne sommes nés de la dernière pluie ! »

« Et moi, je ne veux pas aller en Afrique », dit Rosalie avec un mouvement boudeur du menton. « Jeannine, bois ton café, il va être froid. »

Elle se pencha pour repousser vers sa belle-sœur la tasse de cuivre. Au-dessus d’elle se rencontrèrent les yeux de la sœur et du frère, chacun reconnaissant dans l’autre la moitié du rêve qui lui manquait et qui était brisé depuis longtemps, comme les deux parties d’un écu partagé entre deux amants condamnés à des années de séparation.

Tous à Zanzibar
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